C’est une salle de la Maison de l’Organisation des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (OEACP) sise à Bruxelles, rue de l’Aqueduc qui accueille, ce samedi 19 février, les échanges, à cœur ouvert, entre le chef de l’Etat burundais et certains membres de la diaspora, en marge du 6ème Sommet UE-UA.

Tout est bien préparé : un bouquet de fleurs pour le couple présidentiel, une salle préalablement animée, avec une ambiance assurée par des tambourinaires et des chansons traditionnelles burundaises de bienvenue, scandées par quelques sympathisants du pouvoir burundais.

Apparemment, tous ne reprennent pas le refrain mais nombreux sont ceux qui le font à gorge déployée, agitant gaillardement de petits drapeaux burundais. Une ambiance bon enfant mais avec un brin d’électricité dans l’air au vu des personnalités de tout bord présentes et des questions qui les taraudent.

Dans la salle, quelques figures emblématiques de la campagne « Halte au 3ème Mandat » contre feu président Pierre Nkurunziza en 2015, sont là, sereines. Il y a surtout le président de l’Aprodh, Pierre-Claver Mbonimpa.

Ce doyen d’âge des défenseurs burundais des droits de l’Homme a pris un coup de vieux, sa pommette gauche est déformée, creusée, une profonde cicatrice rappelle la balle qui s’y est logée lors de la tentative d’assassinat dont il a été victime avant d’être évacué pour la Belgique où il vit désormais en exil. Son regard en dit long.

Quelques figures de la société civile en exil face au président

Contrairement à ce qui a été écrit sur mon intervention, tout ce que je demande, c’est que justice soit faite. Il serait difficile voire impensable d’envisager de rentrer au pays sans que ceux qui vous ont endeuillé soient traduits devant la justice parce qu’il y en a qui regagnent le pays pour disparaître par après », tient à préciser le président de l’Aprodh.

Autre visage familier des Burundais dans cette salle de la Maison de l’OEACP, celle du président de l’Olucome, Gabriel Rufyiri, avec ses chemises en tissu pagne africain.
Cet inconditionnel de la bonne gouvernance est connu pour ses campagnes contre la vie chère et ses prises de position contre la corruption, les malversations économiques et l’enrichissement illicite.

Il n’hésitera pas, séance tenante, de montrer la banderole brandie lors de sa manifestation organisée le 16 juillet 2014 à Bujumbura devant la place de la Révolution.

Quand il prend la parole, Gabriel Rufyiri fustige le slogan « Ntukorako » (’’On ne touche pas’’, NDLR), repris souvent par les gens proches du pouvoir : « Le président a répondu que ce slogan est scandé par des gens qui veulent qu’on reste dans la misère, que c’est de la boulimie. Il a promis qu’il va corriger cela et qu’on entendra plus ce genre de slogan ».

Le président de l’Olucome profitera de cette occasion pour remercier le chef de l’Etat, aujourd’hui dans les bonnes grâces de l’Union Européenne, pour l’organisation de cette rencontre et surtout du Forum national sur le développement. « Mais il faut que tous les beaux discours soient suivis d’actes concrets », recommande-t-il.

« Le dialogue avec tous les Burundais sans exclusion aucune »

Sur la question en rapport avec le budget, le chef de l’état évoquera une somme de 4 milliards BIF recouvrée. Le président de l’Olucome rappellera que dans les recettes exceptionnelles à la rubrique appelée « Recouvrement des fonds détournés », il y a plusieurs années, cette rubrique n’avait que 1.200.000 BIF.

Le chef de l’Etat a répondu qu’il a ouvert, avec le ministre des Finances, un compte spécial et que ce montant sera versé dans le budget général de l’Etat exercice 2022-2023. Satisfecit pour toute la salle et salves d’applaudissements.

Des acclamations comme celles qui fusent de partout quand le couple présidentiel entre dans le hall de l’OEACP, suivi par le chef de la diplomatie burundaise.

Le chef de l’Etat réitèrera son attachement aux valeurs d’unité et de dialogue avec tous les Burundais sans exclusion aucune : « C’est de la diversité des idées que jaillissent les meilleures solutions », peut-on lire sur le compte Twitter de la présidence burundaise, ’’Ntare House’’.

Pour reconstruire le pays, poursuit le chef de l’Etat dans un autre tweet de Ntare House, il faut dialoguer avec ses opposants parce qu’en échangeant vous finissez par avoir une même vision pour le pays.

Dehors, des banderoles, pas tendres

Le jour de la rencontre du Président Ndayishimiye avec la diaspora, des membres de l’opposition burundaise ont  bravé le froid de février pour donner un autre ton. « Arrêtez les violations massives des droits de l’Homme », « Le peuple a droit à une vie digne », « Burundian lives matter (la vie des Burundais compte », « Créez des conditions favorables au retour des réfugiés », « Non au langage qui distrait et endormit le peuple, nous voulons les actes concrets et positifs », « Non à la dilapidation des ressources du pays », « Nous dénonçons le verrouillage de l’espace démocratique », « Il faut arrêter les crimes en cours au Burundi », « Nous voulons des Forces de l’ordre qui protègent et non celles qui tuent », pouvait-on lire sur des pancartes brandies par des manifestants  devant le Conseil de l’Union Européenne à Bruxelles.
C’étaient pour la plupart des opposants ou des membres des associations de la société civile burundaise en exil. Il y en a qui tenaient des photos des personnes portées disparues depuis la crise de 2015.

Parmi ces manifestants, des visages bien connus comme Charles Nditije, un ancien leader de l’Uprona, Chauvineau Mugwengezo qui se réclame président de parti UPD Zigamibanga, Aimé Magera, porte-parole d’Agathon Rwasa, Vital Nshirimana, un des ténors de la société civile burundaise en exil.


Source: IWACU Burundi

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